samedi 10 décembre 2011

Des œufs, un panier et une crise

J’ai commencé à exercer ce métier alors que LA crise avait déjà commencé.

Parce qu’en temps de crise, les entreprises ont tendance à tirer sur les prix de tous les prestataires avec lesquels elles travaillent, les cabinets d’avocats n’ont pas tardé à en faire les frais.

Des cabinets ont dû se séparer de collaborateurs et même d’associés pour s’adapter à la nouvelle conjoncture.

Indépendamment de cette crise, des confrères et amis plus expérimentés que moi, à la tête de leurs propres structures ou associés, m’ont régulièrement alerté sur le fait qu’il ne faut jamais faire dépendre l’équilibre d’un cabinet d’un seul et même client, pour la bonne et simple raison que si celui-ci devait prendre la décision de partir, le cabinet aurait de grandes difficultés à s’en remettre.

Le problème, quand on est avocat, est que les circonstances font qu’avec le temps, sans pour autant que ce soit l’unique client, vous devez inexorablement une grande partie de votre chiffre d’affaires à une seule et même entité.

Les circonstances font qu’un client, qui a confiance en vous, vous confie toujours plus du travail et qu’un avocat, quel qu’il soit, lui répond rarement :« Ecoutez non, je n’ai pas envie de faire dépendre une trop grande partie de mon chiffre d’affaires de votre structure, donc confiez plutôt ce travail à l’un de mes confrères ».

Là où cela se complique c’est quand cette structure, pour des raisons extérieures à la qualité de votre travail, est liquidée ou, et c’est encore plus fréquent en temps de crise, quand elle se fait racheter par son principal concurrent, lequel a déjà pleine confiance en son cabinet d’avocats habituel et ne souhaite donc pas en changer.

A cet instant, et cela vient d’arriver au cabinet dans lequel exerce l’un de mes confrères, vous vous rappelez, qu’en temps de crise les équilibres sont encore plus instables que d’ordinaire et qu’il vaut mieux avoir, sur le long terme, 20 clients réguliers qui paient 2.000 que 3 clients fidèles qui paient 30.000…

Une histoire d’œufs, de panier...et de crise.

dimanche 4 décembre 2011

Merci Maître !

La reconnaissance du client est ce à quoi aspire tout avocat digne de ce nom.

On a tendance à nous expliquer que l’avocat à un adversaire naturel qui serait la partie adverse, mais que, parfois, son propre client peut lui poser des difficultés.

C’est particulièrement vrai quand son client lui ment et dessert ainsi ses propres intérêts ou encore, cas plus fréquent, quand ce dernier accepte mal les recommandations de son conseil.

Dans ces conditions, cela vous oblige, d’abord, à redoubler de force de persuasion pour convaincre votre client de la justesse de votre stratégie, avant même de commencer à persuader le Tribunal de la pertinence de votre argumentation.

Parce que l’issue d’un litige est toujours incertaine, j’ai tendance à ne jamais rien promettre à mes clients et ce, même quand l’affaire paraît gagnée d’avance.

J’ai vu trop de retournements de situations où, « sans trop savoir pourquoi » un Tribunal décidait que la partie adverse était totalement dans son droit et que le client que je défendais avait soit partiellement, soit complètement tort, pour promettre quoi que ce soit, à qui que ce soit.

Dans ces conditions, même si la voie de l’appel reste ouverte, vous devrez faire avec la déception de votre client qui attendra plusieurs mois avant qu’un nouveau degré de juridiction lui donne enfin raison.

En revanche, l’un des avantages de ne jamais rien promettre tient dans l’effet de surprise qui naît chez votre client quand vous lui annoncez LA bonne nouvelle.

Vous pouvez lui expliquer que vous vous êtes gardé de tout triomphalisme avant qu’un jugement soit rendu, mais que le Tribunal a fait droit à l’ensemble de ses demandes.

A cet instant vous avez invariablement droit à un silence suivi d’un : « Merci beaucoup Maître ! », plus ou moins teinté d’émotion selon l’importance de l’enjeu pour le client.

Une vraie satisfaction pour l'avocat que vous êtes.