jeudi 29 septembre 2011

3 ans plus tard, la donne a changé

Je vais fêter dans quelques jours mes 3 ans d’expérience en tant qu’avocat collaborateur et entrer, par la même occasion, dans ma 4ème année.

Depuis mes débuts, force est de constater que de nombreuses choses ont changé tant dans ma profession que dans ma façon de l’appréhender.

J’ai débuté ma collaboration en même temps que l'annonce de la crise des subprimes.
Même si mon cabinet n’a pas trop eu à subir le contrecoup de la crise, cette dernière, qui s’est muée en crise des dettes souveraines, reste palpable.

Les clients qui payaient jadis sans rechigner, aujourd’hui négocient, quand ils ne refusent pas purement et simplement de payer.

Les cabinets sont nombreux à avoir dû réduire considérablement la voilure et les élèves -avocats diplômés des CAPA 2010 et 2011 ont pu et peuvent s’apercevoir de la difficulté réelle à trouver une première collaboration.

Au delà de la situation économique, mon état d’esprit a également changé.
Je suis beaucoup plus autonome qu’à mes débuts et mes envies s’en ressentent.

J’apprécie toujours de travailler pour le compte d’un autre, d’autant plus quand les dossiers que cette collaboration m’amène à traiter sont intéressants et stimulants intellectuellement, mais j’ai depuis quelques mois, réussi à développer une clientèle personnelle qui m'intéresse tout autant, sinon plus, et m’oblige donc à faire un choix.

Travailler à plein temps dans un cabinet demande, en effet, un investissement de tous les instants.
Quand vous gagnez en expérience, vous faites les choses plus vite, ce qui vous devrait normalement vous dégager plus du temps pour traiter les dossiers de vos clients personnels.
Dans les faits, la plupart des associés qui constatent votre progression et votre capacité à faire plus vite (et mieux) ce qu’ils vous demandent sont tout aussi prompts à vous confier plus de dossiers et plus d’audiences à assurer.

Dans ces conditions, répondre à une demande grandissante de mes clients personnels est de plus en plus difficile et intenable à court ou moyen terme, sauf à accepter définitivement l’idée selon laquelle à la fin d’une (déjà) longue journée de travail au cabinet commence une nouvelle journée (week-end compris) dédiée à mes propres clients.

Parce que j’aime travailler, mais également profiter de la vie, j’ai pris la décision que ma 3ème année de collaboration sera ma dernière en tant que collaborateur au sein de ce cabinet, au regard de ma réelle difficulté à concilier clientèle personnelle et dossiers du cabinet et au constat que les choses ne sont pas prêtes de changer.

Parce qu’un collaborateur de 3 ans d’expérience est un profil assez recherché, j’ai été récemment approché par un cabinet que j’apprécie et à qui j’ai expliqué ma situation et mes aspirations, à savoir celles de pouvoir concilier plus ou moins sereinement une clientèle personnelle grandissante et les dossiers du cabinet.

La perspective ne l'ayant pas découragé de me faire une proposition ferme et le courant étant bien passé entre nous, je vais annoncer dans quelques semaines mon départ au cabinet qui m’emploie et partir vers une nouvelle aventure de collaboration, qui, c’est du moins l’objectif avoué, devrait me permettre de ne plus avoir à refuser des dossiers par manque de temps pour le traiter et/ou par peur que cela me soit reproché.

Pour l'heure, je ne m’estime pas encore assez courageux et déterminé pour sauter le pas de la création d'un cabinet commun avec des confrères et amis.

Même si je ne ferme pas la porte à cette éventualité (bien au contraire), je mesure le chemin parcouru depuis mes débuts et reconnais que, sur bien des points, la donne a changé.

vendredi 16 septembre 2011

La tentation « juriste »

A bientôt 3 ans de mes débuts d’avocat, je constate que de plus en plus d’amis et confrères d’une expérience plus ou moins similaire à la mienne font, sans le moins regret, le choix de la reconversion.

Même si chaque cas est particulier, le contexte qui les amène à prendre cette décision est très souvent une très belle proposition faite par une entreprise.

L’entreprise peut, en effet, présenter de nombreux avantages pour un jeune avocat.
La première est qu’elle est souvent demandeuse du profil d’un avocat qui intégrerait son service juridique. L’idée étant de recruter en interne quelqu’un de rompu à la pratique, de façon à permettre à la structure de trouver les réponses aux questions juridiques qu’elle se pose, en sollicitant le moins possible le concours extérieur d’un cabinet d’avocats.

La proposition qui est faite à l’avocat consiste bien souvent à rejoindre un poste haut placé dans l’organigramme de la structure avec la rémunération qui l’accompagne.

Les confrères que j’ai vu partir ces derniers mois en direction du monde de l’entreprise l’ont toujours fait en faveur d’un poste qui allait leur rapporter plus que ce qu’ils gagnaient et qui s’avérait, en termes de responsabilité, être un challenge intéressant.

Le deuxième avantage est celui des horaires. Même si, comme tout cadre qui se respecte, l’avocat sera soumis au forfait jour et à des horaires soutenus, l’entreprise présente l’avantage d’avoir des horaires moins contraignants ou, du moins, plus prévisibles que ceux d’un cabinet d’avocats.

Même s’il m’arrive encore parfois de décommander des restaurants ou des sorties prévus à l’avance en raison d’une « urgence-cabinet » , ceux de mes confrères qui ont l’impression de n’avoir fait que cela depuis 3 ans (faute pour les restaurants de servir après 23h), trouvent dans le monde de l’entreprise l’opportunité de ne plus avoir à mettre leur vie sociale entre parenthèse.

Un autre avantage est celui des vacances. Elles se résument à 5 semaines dans le métier d’avocat (quand il est possible de les prendre toutes). Elles peuvent aller jusqu’à 10 semaines dans quelques unes des entreprises qu’ont décidé de rejoindre mes ex-confrères.

Le dernier intérêt du métier de juriste découle directement de l’importance du juridique dans une entreprise en comparaison à ce qu’il représente dans un cabinet d’avocat.

Au sein d'un service juridique, vous avez la responsabilité de veiller à ce que tout ce qui est signé, validé ou décidé par l’entreprise soit conforme à la loi. Ce n’est cependant pas du département juridique d’une société que dépendront les performances financières de la société.

A l’inverse, la survie d’un cabinet d’avocats dépend en grande partie de la qualité du travail que vous réalisez.

La dose de stress subie sera donc, la plupart du temps, moins importante pour un juriste qu’elle ne l’est pour un avocat en exercice.

Pour toutes ces raisons, je ne suis pas vraiment surpris par l’engouement que suscite le métier de juriste d’entreprise chez de nombreux confrères d’une expérience supérieure ou égale à la mienne.

Je ne les envie pas, mais je comprends tout à fait ce qui peut les amener à une telle « extrémité ».

mercredi 7 septembre 2011

Expliquer simplement des choses complexes

La rédaction d’une consultation juridique est un exercice intellectuel assez intéressant.

Le client vous pose une question dont il n'a généralement aucune idée de la réponse. Parfois, il pense avoir la bonne réponse, mais, eu égard à l'enjeu, il préfère ne pas prendre le risque de s'être trompé dans les grandes largeurs.

Quelles que soient les raisons qui l'amènent à vous poser cette question juridique, votre travail consistera toujours à lui donner la réponse la plus précise possible, en gardant à l'esprit qu'il est très souvent peu habitué au langage et au raisonnement juridiques.

Même des problématiques complexes peuvent et doivent être rendues abordables, faute de quoi le client reviendra inévitablement vers vous pour vous poser un bon nombre de questions complémentaires qui n'auront en réalité pour but que de savoir ce que vous "entendiez par ça" ou "par ça".

Il faudra cependant vous garder d'éluder des problèmes et difficultés juridiques au prétexte qu'ils seront jugés comme trop compliqués par le client, dans l'hypothèse où vous les évoqueriez dans la consultation.

Tout l'art de la consultation consiste justement à réussir à expliquer des choses complexes en leur donnant une apparence de simplicité.