lundi 9 novembre 2009

L'art de la plaidoirie

Je plaide assez régulièrement, mais je dois reconnaître que les plaidoiries se suivent sans pour autant se ressembler.

Il m’arrive de plaider un dossier dont le fond n’a pas été préparé par moi et pour lequel je remplace un confrère du cabinet empêché à la dernière minute. Dans ces conditions, j’ai encore quelques difficultés à me détacher de mes notes durant l’audience.

Je plaide parfois des affaires pour lesquelles le fait d’avoir réellement travaillé dessus ne change pas grand-chose à la réalité qui veut que la situation du client soit difficilement « défendable ».

À côté de cela, il n’est pas rare que j’aille défendre des dossiers sur lesquels j’ai travaillé suffisamment pour les plaider « les yeux fermés », et ce, d’autant plus que les faits et le droit me donnent d’emblée un véritable ascendant sur mon contradicteur.

Dans ce cas de figure, et pour peu que vous soyez à l’aise à l’oral, vous avez la possibilité de démonter point par point l’argumentation de votre confrère tout en y mettant le ton et la gestuelle (voire l’humour) qui ont le don de tenir les juges en haleine.

C’est à cet instant que la plaidoirie devient un réel plaisir. Tel un musicien, votre travail ne consiste plus qu'à combiner les mots d’une manière agréable à l’oreille…

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour,

Je me pose tout de même une question quant à la fonction de la plaidoirie : si son utilité est évidente dans le cas où le jugement repose sur une part d'irrationnel - les jurés non professionnels des assises, par exemple - à quoi sert-elle lorsque le jugement repose sur le président et ses assesseurs s'il en a ?

Un point de droit étant un point purement technique, et les personnes à convaincre étant elle même techniciennes, en quoi l'aspect littéraire du discours peut-il aider ? Lister les points et leur enchaînement logique devrait être suffisant, voire plus efficace.

Je me pose bien sûr la même question quant au réquisitoire.

Merci d'avance pour vos lumières

Maître Spcial a dit…

Dans les procédures dites écrites, vous pourriez (en théorie) déposer vos conclusions sans les plaider en indiquant au juge que vous vous en tenez à vos écritures, sans qu’il vous en tienne rigueur.

À mon sens, la plaidoirie n’est là que pour tenter de convaincre définitivement le juge, avant même qu’il ait à lire vos conclusions et celle de votre contradicteur.

L’aspect littéraire aide à mettre le mieux possible en valeur l’argumentation juridique et technique développée dans les écritures.

Je pars souvent (peut-être à tort ?) de l’idée que les juges se souviendront des arguments forts soutenus durant les plaidoiries par les avocats (ils prennent souvent des notes pendant l’audience) et qu’ils n’auront en réalité que peu de temps à consacrer à la lecture et à l’analyse des dossiers qui leur sont remis après l’audience.

Du coup, j’aime à penser que la façon dont je présente mes arguments face à un confrère qui soutient mordicus l’inverse de ce que je dis, peut vraiment compter.

Et ce d’autant plus qu’il y a des matières du droit qui laissent une place intéressante pour un réel pouvoir d’appréciation au juge professionnel

Anonyme a dit…

Merci beaucoup pour votre réponse. Je crois que je comprends un peu mieux.

Particulièrement, le non juriste que je suis à tendence à croire que tout est scrict et non susceptible d'interprétation. Votre description bouscule cela. J'avais tendance à négliger le facteur temps également.

Il faudra que je vienne assister à une audience un jour, pour voir comment tout cela se passe.

Merci encore, et bon week-end, si vous avez un peu de temps libre.